Créé par l'AFSE en 2015, l'objectif de ce blog est de permettre aux économistes d'avoir des échanges autour des grands thèmes actuels. L’AFSE n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les différentes notes : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

 

Pourquoi l’emploi se polarise

Gregory Verdugo - Maître de conférences à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, chercheur au Centre d’Économie de la Sorbonne

Au-delà de la montée des inégalités salariales et de la précarisation croissante du marché du travail pour les moins qualifiés, la période contemporaine se caractérise par une polarisation croissante de l’emploi : tandis que les plus diplômés tirent parti d’une économie de plus en plus gourmande en qualifications, la raréfaction des emplois intermédiaires contraint les moins qualifiés à se tourner vers les services à la personne, caractérisés par des emplois moins payés et peu stables, mais où la demande est croissante. Cette note rappelle le rôle du progrès technique, mais également du commerce international et des institutions du marché du travail dans cette dynamique, et souligne que des emplois plus qualifiés pourraient se voir à leur tour concernés dans un avenir proche.


Flora Bellone - Professeure de Sciences Economiques, Université Côte d’Azur; Chercheur associé à l’OFCE-Sciences Po

La mondialisation a pris un tournant inédit depuis les années 1990 du fait de l’intensification massive du phénomène de fragmentation internationale des processus de production. Cette dernière pourrait remettre en cause l’idée-même que l’ouverture internationale induit systématiquement un gain net pour tous les pays. L’expérience de divers pays émergents au 19ème et au 20ème siècle souligne que, lorsque la mondialisation est nourrie par une baisse fortement asymétrique des coûts de transport des marchandises et des coûts de transferts d’information et des connaissances, il peut survenir conjointement une dynamique globale de divergence et des trajectoires isolées de miracle économique. La mondialisation à l’œuvre depuis les années 1990 s’appuie essentiellement sur la réduction des coûts de transfert du savoir-faire et des connaissances, et induit de ce fait une re-dispersion des activités industrielles vers les pays à bas salaires. Se pose alors pour les pays développés, qui voient la rente d’agglomération dont ils bénéficiant jusqu’alors s’éroder inexorablement, la délicate question des politiques publiques adéquates.


Gilles Dufrenot - Professeur des universités , Aix-Marseille Université , Faculté d'Économie et de Gestion (FEG)

Les controverses actuelles sur la stagnation séculaire s’inscrivent dans la continuité de débats anciens au sein de l’analyse économique, traversée depuis longtemps par la crainte d’un épuisement de la croissance. Si les pays industrialisés semblent bien s’installer dans un régime de croissance et d’inflation faibles, les rôles respectifs des facteurs d’offre et de demande, ainsi que du cycle financier, dans cette situation sont aujourd’hui largement débattus. Parmi les choix envisageables de politique économique destinés à y remédier, la politique budgétaire a probablement davantage de marges de manœuvre que la politique monétaire, aux prises avec le plancher des taux d’intérêt à zéro. Cette note souligne également que l’augmentation des inégalités alimente probablement la dynamique de la stagnation séculaire, et devrait donc faire l’objet à la fois d’un traitement adéquat par les politiques publiques et d’analyses académiques plus approfondies.


Anne Boring - Professeure assistante à la Erasmus University de Rotterdam & Chercheuse associée à Sciences-Po Paris (LIEPP & PRESAGE)

Alors que les inégalités entre hommes et femmes sur le marché du travail sont souvent expliquées par les contraintes familiales (inégale répartition des tâches domestiques, maternité(s)…), cette note souligne, à l’aide de données récentes issues du Ministère de l’enseignement supérieur, que les inégalités professionnelles commencent en réalité dès la sortie de l’université. Cela s’explique tout d’abord à l’université-même, où les femmes sont moins présentes dans les filières scientifiques et plus généralement, dans les filières les plus rémunératrices. A l’arrivée sur le marché du travail, ensuite, les femmes obtiennent moins souvent tant des emplois stables que des fonctions d’encadrement. Se pose alors la question du rôle des établissements d’enseignement supérieur afin de réduire les inégalités à l’entrée sur le marché du travail.


Fallait-il faire l’Euro ?

Elie Cohen - Directeur de Recherche au CNRS, Professeur à Sciences-Po Paris

La succession des crises depuis 2009 et leurs conséquences (décennie perdue dans l’Eurozone, divergence accrue entre Nord et Sud…) ont mis au jour les nombreuses failles économiques et institutionnelles caractérisant l’unification monétaire européenne. Pourtant, s’il est désormais entendu que l’Euro a été mal conçu, et mal mis en œuvre, c’est bien souvent au pire des difficultés que les solutions nécessaires à son maintien ont été élaborées et mises en œuvre. Cet apparent paradoxe renvoie à la nature profonde de la monnaie unique, à la finalité davantage politique qu’économique. L’attachement à l’Euro apparait ainsi aujourd’hui puissant, en dépit de difficultés qui devront bien finir par être corrigées en profondeur.


Patrick Artus - Conseiller économique, Natixis

Il paraît évident que le modèle économique de la zone euro évolue dans un sens différent de celui du modèle traditionnel du libéralisme (appelons ce modèle le « consensus ancien de Washington »), sans doute en réponse aux demandes des opinions. La zone euro devient plus protectrice (contre le dumping social ou environnemental, contre les acquisitions étrangères, contre les multinationales de l’Internet) ; elle souhaite avancer vers la coordination fiscale et sociale de ses pays (harmonisation fiscale, réduction des biais de compétitivité comme les travailleurs détachés) ; elle souhaite un supplément d’interventionnisme des Etats (investissements publics du Plan Juncker, proposition de budget de la zone euro, mise en place de projets communs d’investissement public) ; elle a mis la politique monétaire au service de la croissance. Certaines évolutions sont clairement favorables ; il faudrait se demander si d’autres ne peuvent pas nuire au dynamisme économique de la zone euro (s’il y a réduction de la concurrence, rôle accru des Etats dans les investissements, peut-être hausse de la pression fiscale).


Louisa Toubal - Chef de projet La Fabrique de l'industrie

Depuis les années 1980, le Royaume-Uni a fait de l’attraction d’investisseurs étrangers un élément clé de sa politique industrielle. À la différence de la France, le pays a laissé vendre la plupart de ses fleurons nationaux. C’est aujourd'hui le pays qui attire le plus d’investissements directs étrangers (IDE) en Europe. Ce billet souligne les effets ambigus de ces derniers au Royaume-Uni. Contrairement aux idées reçues, les IDE ont ralenti la désindustrialisation de l’économie britannique, notamment dans le secteur automobile, et contribué à sa montée en gamme. Néanmoins, les capitaux étrangers ne se répartissent pas de façon équitable entre secteurs et régions, aggravant de fait les inégalités spatiales. Dans le contexte du Brexit enfin, la forte dépendance du Royaume-Uni aux IDE n’est pas sans risque pour son économie.


Claude Diebolt - Directeur de Recherche au CNRS à l’Université de Strasbourg

Le thème des Entretiens de l'AFSE, organisé lors des Jéco le 07/11/2017,  est : la preuve dans les Sciences économiques.

Les intervenants seront : Michel Aglietta (Professeur émérite d’économie, conseiller scientifique au CEPII et à France Stratégie), Richard Arena (Professeur de Sciences économiques), Claude Diebolt (Directeur de Recherche au CNRS à l’Université de Strasbourg et Président de la Section 37 (Economie et Gestion) du Comité National de la Recherche Scientifique) et Marie Claire Villeval (Directrice de Recherche CNRS, GATE)


Thomas Barnay - Professeur à l’Université Paris-Est Créteil, Vice-Président
en charge des relations scientifiques et internationales du Collège des
Economistes de la Santé

Thomas BARNAY
Professeur de sciences économiques, Université Paris-Est Créteil / Phd, Full Professor in Economics, Upec
Chercheur à Erudite, Tepp et IST-PE / Research Fellow at Erudite, Tepp and IST-PE
Directeur du Master 2 Economie de la Santé


Etienne Wasmer - Professeur à Sciences Po

Dans un sondage Ipsos Sopra Steria récent et peu commenté, publié le 30 mars (« Présidentielle 2017: les Français et le pouvoir d’achat »), la question du pouvoir d’achat est prioritaire dans leur vote pour 37 % des Français et occupe une place importante pour 56 % d’entre eux. Ces proportions sont plus élevées pour les électeurs de François Fillon et surtout de Marine Le Pen, dont 45 % des électeurs jugent cette question prioritaire. Et, sans surprise, ils ne font guère confiance à leurs candidats pour la régler, le taux de confiance étant de 43 % pour Jean-Luc Mélenchon, 38 % pour Emmanuel Macron et entre 20 % et 34 % pour les autres candidats.