La réduction des injustices climatiques : enjeu clé de la COP21 à Paris

Au-delà de la nécessaire efficacité des mesures qui seront retenues lors de la COP21 pour véritablement lutter contre le changement climatique,  chère à mes collègues économistes, il faudrait d’abord garantir un minimum d’acceptabilité de celles-ci par les différentes parties prenantes.

De mon point de vue, une des clés de cette acceptabilité, et donc de la « réussite » de la COP21, est le « traitement » qui sera réservé aux pays dits « vulnérables », et aux pays africains en particulier ; … si les mesures proposées ne vont pas dans le sens d’une réduction des injustices qu’ils subissent en matière de capacité d’adaptation au changement climatique, aucun accord ne pourra être obtenu.

Au-delà de la nécessaire efficacité des mesures qui seront retenues lors de la COP21 pour véritablement lutter contre le changement climatique,  chère à mes collègues économistes, il faudrait d’abord garantir un minimum d’acceptabilité de celles-ci par les différentes parties prenantes.

De mon point de vue, une des clés de cette acceptabilité, et donc de la « réussite » de la COP21, est le « traitement » qui sera réservé aux pays dits « vulnérables », et aux pays africains en particulier ; … si les mesures proposées ne vont pas dans le sens d’une réduction des injustices qu’ils subissent en matière de capacité d’adaptation au changement climatique, aucun accord ne pourra être obtenu.

Il est en effet connu que l'Afrique, notamment, souffrira davantage des effets du changement climatique,  quelques soient les efforts qu’elle entreprendra en matière d’adaptation, sachant que sa contribution aux émissions est inférieure à 4% du total mondial. Le principe de responsabilité commune, mais différenciée, a été retenu pour tenir compte ce différentiel, de ces injustices, dans le degré d’adaptation, et donc de résilience, des pays face au risque de changement climatique.

Mais sera-t-il suffisant pour permettre d’aboutir à un consensus à Paris ? Et, plus généralement dans une perspective de long terme, permettra-t-il de réduire les injustices climatiques ? Voilà ce qui me semble être les deux questions centrales à se poser avant la COP21.

Il est important de souligner que ces inégalités/injustices climatiques sont certes engendrées par l'évolution (actuelle) du climat, mais que celle-ci résulte principalement des choix d'orientations politiques passés des pays riches en matière de lutte contre le changement climatique.

Les pays vulnérables, ainsi que les ONG qui les soutiennent, revendiquent ainsi une certaine « responsabilité historique » du Nord dans l’accroissement des émissions de gaz à effet de serre depuis la révolution industrielle, au milieu du 19ème siècle. Ces pays réclament  donc un certain droit à réparation et compensation ; dont on ne pourra pas faire fi lors des négociations à venir… Les mesures qui seront proposées devront à mon sens pleinement intégrer cette dimension, indispensable pour leur acceptabilité, et donc pour l’efficacité à terme de la lutte contre le changement.

Le principe de responsabilité commune, mais différenciée, qui s’inscrit dans l’esprit des « grands principes de justice distributive » provenant de la philosophie morale et politique, même s’il me semble de "bon sens", sera très difficile à mettre en œuvre dans la pratique. En effet, d'un point de vue théorique et conceptuel l'éthique de la responsabilité qui découle de ces grands principes de philosophie morale est flatteuse, et parfaitement compréhensible, mais quand il s'agit de la mettre en œuvre concrètement au quotidien, on fait face à de nombreux obstacles. Toute la question est donc de savoir comment ce principe sera-t-il « mis en musique », comment prendra-t-il en compte les nécessaires compensations des injustices climatiques,… bref, comment sa mise œuvre sera-t-elle appréhendée par les pays du Sud ?

Pour finir, la COP21 représente une étape cruciale dans notre capacité collective à organiser la lutte contre le changement climatique. Et, une des clés de sa réussite, sera le dosage que nous arriverons à proposer entre l’efficacité des mesures et leur acceptabilité. Car, de mon point de vue, si l’on recherche une efficacité immédiate, en raison de l’urgence, et par la mise en œuvre de mécanismes et d’instruments très sophistiqués, mais susceptibles d’être rejetés par les pays Sud, nous risqueront de pénaliser encore plus durement notre capacité à lutter efficacement à moyen et long termes.

 

Alain Ayong Le Kama
professeur d’économie à l’Université de Paris Ouest, Nanterre – La Défense
président de l’association française des économistes de l’environnement et des ressources naturelles (FAERE : http://faere.fr/fr/)
Membre du Conseil scientifique des JECO